Les grilles étaient là bien avant
Entre le terrain vague et les immeubles
Le camp des Roms est par ici
Vers la province et loin de Paris
A trois rues de la gare d'Austerlitz
On a découpé ses frontières
Dans un champ sur les rives du Danube
L'herbe pousse verte et grasse
Entre les buissons dans l'herbe haute
Personne ne passe
Les gens, les enfants, les policiers, la mairie
Personne ne reste
Ces berges ne donnent sur aucun fleuve
Tous les papiers tous les débris,
Toutes les couleurs des déchets
Le drapeau en charpie
Flottent en tous sens
La boue souille tout le blanc le bleu
Le rouge au vent des sacs
Des bâches, des planche, des tôles
C'est Noël, et alors ?
Un camion a posé trois chiottes une benne à ordure
Personne ne vient personne ne viendra
La fumée dense et trop noire au-dessus
Le camp à cinq heures attrape la nuit
Mais le train entre dans la capitale
L'oubli, le froid, les tricots de ces dames
Ont des trous dans les manches
Des couleurs du dimanche et de fond de pelote
Les enfants ont des prénoms je crois
Marko, Mileta, Suljo, Tarik, Nela, Vedrana
Petits enfants le long des voies dans leurs tricots trop grands
Les yeux noirs en silence attendent sous la pluie