Ticket
La mer près du Yaudet, pour m'en souvenir
quand viendra le temps de rêver, au plus loin de la côte
Les hêtres, à l'automne rouge, pour avoir
sous les yeux, devant Paris, l'image de la forêt
Je veux penser maintenant au boulevard Ornano, à la Goutte d'Or,
pour le pavé et les cris, quand tout est silence
Il est étrange en ce village désert d'entendre un rire de femme,
Il est étrange, dans la rue principale,
où rien ne bougera encore aujourd'hui,
de suivre le ballet des vendeurs à la sauvette
Voici qui me sauve, face aux maisons vides :
flâner dans le flot du passage, autour de Montmartre
Aux pierres sèches opposer le retour de l'écume
Aux statues une épaule aperçue, une hanche
un frôlement
Au décor opposer la comédie entière pour que tout déborde
que tout s'exagère et bouillonne enfin de plaisir et de vie
La mer près du Yaudet, pour m'en souvenir
Ces souffles de vent convoquent au matin
Les rires, les femmes, la sensation de couleur
et ces grands gueulards qui s'interpellent
d'un trottoir à l'autre, la rumeur de la ville
le bruit des autos
Prendre une ligne, gonfler les poumons
Respirer le carton d'un ticket de métro
et s'il reste la mer, c'est qu'elle embrasse tout.
© JPR le 05 mai 2012