La mouche
Le poème s’impose en tant que prophétie
Au milieu de la place où se tiennent les anciens
J’aurai trouvé mon nom, ils se seront serrés
Personne ne veut entendre dira le premier
Le sommeil nous prendra toute la journée
Appuyés sur les mots, entourés de passage
Absents au monde si ce n’est une mouche
Son seul bruit présent renvoie au loin la vie
Dans le demi silence, passent robes, jambes, voix
C’est ainsi je suppose, juste avant l’agonie
Mais la mouche se pose enfin sur ses lèvres
Il va parler, il parle
Le poème s’impose en tant que prophétie
Poème du temps qui va prendre la pluie
Poème médisant par ennui du voisin
Poème du fond de gorge craché sur le trottoir
Il est rare qu’une femme montre ses bas noirs
Au bord de la fontaine enjambe un des vieillards
Il est rare qu’un des vieux se relève
Je le suivrais des yeux remontant vers l’enfance
Très anciens camarades attendant la pension
Parmi les vieux pigeons près du manège en bois
Le poème s’impose en tant que prophétie
Hier avec les autres à ricaner au bar
Aujourd’hui sur la place pour me moquer encore
J’attendrai que la mouche se pose sur mes lèvres
© JPR 19 juin 2012